Embarqué dans une tournée en trio avec Diederik Wissels et Ana Rocha, le saxophoniste namurois a plusieurs fers au feu, notamment des travaux de recherche sur la modulation électro-acoustique. Toujours « en communion avec les musiciens et le public ».
Dominique Simonet
C’est avec une formation pas banale que Nicolas Kummert est reparti sur les routes d’une tournée extensive en Wallonie : piano (Diederik Wissels), voix (Ana Rocha) et saxophone (lui-même), voilà une formule de trio originale. De toute manière, arrivé à ce point dans une carrière déjà bien remplie, le Namurois n’a que faire de la routine : « Ayant pratiqué le saxophone jazz pendant 25 ans, ce n’est plus jouer des notes de musique qui m’intéresse. Je réfléchis à la manière de partager cette sensation et ce qui m’anime sur scène ».
Longtemps embarqué dans le rythme « sortie de disque, concert et puis passer à autre chose », le saxophoniste a l’occasion de marquer une certaine pause grâce à un projet de recherche artistique au Conservatoire d’Anvers. « Et là, on me demande de prendre le temps de réfléchir à ce dont j’ai envie, à ce que je veux partager dans mes concerts… ».
Création collective
Et voilà ce que Nicolas Kummert a envie de partager : « La musique déclenche chez moi un sentiment de communion avec les musiciens et le public, et c’est ça qui m’a attiré vers ce métier. À partir du moment où j’ai commencé à faire de l’improvisation en groupe, ce sentiment de collaboration immédiate, de création collective, est devenu le fil rouge de ma carrière ».
On s’en rend compte tous les jours : la musique enregistrée est partout, et pas seulement dans les ascenseurs ou dans les métros. Ce qui donne une valeur particulière à la scène : « En concert, on improvise à ce moment là, pour et avec les gens qui sont là. C’est un partage qui donne ce résultat, et même mon saxophone réagit différemment ».
Le thème des deux ans de travail de recherche entamés par Nicolas Kummert à Anvers est « l’interaction entre un musicien en acoustique et moi qui module électroniquement, dans le contexte de l’improvisation ». Un art de modulation électro-acoustique qu’il exerce dans le cadre du trio en tournée actuellement, modulant non seulement son saxophone, mais également le piano de Diederik Wissels et la voix d’Ana Rocha.
Création interaction
Dans ce trio atypique, « les compositions de Diederik sont centrales, avec un langage très riche et très ouvert qui nous permet d’être très libres. Cette liberté au sein de la contrainte, c’est le ciment du groupe. Et cette envie de créer de la musique par notre interaction fait que ça colle pour moi ».
Nicolas Kummert n’est pas né dans une famille de musiciens, mais, regrettant de ne pas faire eux-mêmes de la musique, ses parents ont inscrit leurs enfants à l’académie de Namur. Là, il a rencontré le guitariste Pierre Van Dormael (1952-2008), son premier professeur de jazz… « Et c’est à ce moment-là que je me suis dit que c’était bien comme projet de vie ».
Soliste sans le savoir
Comme enseignants, il a aussi eu la pianiste Nathalie Loriers et le saxophoniste anversois Erwin Vann, qui a fait naître « son amour pour le travail du son ». Tous ces professeurs de haut niveau lui font dire qu’il est « tombé au bon moment ». Il a aussi eu la possibilité de jouer dans le Big Band de Namur, dirigé par Vincent Antoine : « J’avais 14 ans et je n’hésitais pas à me lever et à prendre un solo, sans trop savoir ce que je faisais », sourit-il.
Son parcours passe également par le conservatoire flamand de Bruxelles, où Nicolas Kummert a « appris la langue sur le tas ! » « Si tu veux faire du jazz en Belgique, tu as intérêt à le faire dans tout le pays, qui est déjà si petit… Ayant collaboré avec des musiciens flamands, maintenant, je joue presque plus en Flandre qu’en Wallonie. Et je donne des cours en néerlandais ! », lance-t-il, tout fier, à juste titre.
Le feu Aka Moon
À l’époque du conservatoire, il a aussi eu la chance s’assister à des concerts d’Aka Moon, alors en résidence quasi permanente au Kaai Theater à Bruxelles : « Ils dégageaient une énergie très rock, avec une énergie jazz, et ça aussi m’a donné envie d’être musicien ».
Quand il compose, le saxophoniste namurois a « beaucoup d’inspiration hors du jazz », notamment en musique africaine. « J’ai été pas mal là-bas, avec des musiciens africains qui retournaient chez eux. C’était très intense et très formateur ». D’un autre côté, « J’ai écrit tout un répertoire autour du contrepoint. Bach, les fugues, ça me rend fou ! ». Dans la foulée, il s’intéresse aux « Nouvelles Suites de Pièces de Clavecin » de Jean-Philippe Rameau, contemporain français du grand Jean-Sébastien : « Ce sera mon nouveau sujet de recherche ! ».
Nouveau collectif d’improvisation
En attendant, Nicolas Kummert est en train de lancer un nouveau projet à son image, un collectif d’improvisation appelé « Improvise Brussels », basé à la Jazz Station à Saint-Josse-ten-Noode. « Je compte inviter des musiciens de tous les horizons, ainsi que des artistes d’autres disciplines, comme la danse ». Il compte notamment utiliser le « soundpainting », langage de signes multidisciplinaire, permettant la composition en temps réel, soit l’improvisation, pour les musiciens, les comédiens, les danseurs et les artistes visuels.
Le collectif commencera à répéter à partir de janvier 2026. Pour Nicolas Kummert, son initiative « correspond aussi à la transmission et au partage, et c’est une fonction que, en tant qu’artiste, l’on peut avoir dans la société ».
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